François Ambroise Didot (1730-1801), qui s’attache à perfectionner le système de mesures basé sur le « point typographique » et à livrer de nouveaux caractères dans un registre néo-classique, dès les années 1780, est le fondateur d’une dynastie de fondeurs, imprimeurs et éditeurs dominant la typographie française au XIXe siècle.

Ses fils, Pierre (1761-1853) et Firmin (1764-1836), instaurent un style encore plus austère et dépouillé, s’appuyant sur de forts contrastes dans les registres de la lettre et de la mise en pages, qui triomphe durant la Révolution et l’Empire. Bien que Pierre dans son Épître sur les progrès de l’imprimerie, en 1786, rende un vibrant hommage à Garamont, les caractères didot supplantent les garaldes, lesquelles pâtissent de la tourmente révolutionnaire et du rejet de toute symbolique émanant de l’Ancien Régime.

Avec la Révolution, les caractères Didot supplantent les garaldes.

La plupart des fontes sont recyclées pour les besoins de l’économie de guerre et les imprimeurs s’approvisionnent quasi exclusivement dès lors en types des Didot. Leur mainmise sur l’Imprimerie royale, devenue « nationale », leurs publications remarquables – depuis la Constitution de 1791 jusqu’aux œuvres de Racine, considérés par le jury de l’exposition de 1806 comme « la plus parfaite production typographique de tous les pays et de tous les âges» – les installent en modèle auprès de tous les imprimeurs de France et du continent européen. Giambattista Bodoni, à Parme, se pose comme l’un de leurs concurrents émérites. Toutefois, des réactions souvent vives se font jour à l’encontre de leur typographie, lui déniant la lisibilité dont le Garamond incarne pour certains la perfection insurpassable. Plus profondément, l’avènement des « didones », qu’on désignera sous cette appellation au XXe siècle, accompagne un effort sans précédent de rationalisation et de mécanisation de l’imprimerie. La bourgeoisie se flatte d’être la mieux à même d’assurer le « progrès » industriel et social ; les didones deviennent représentatives de cette ambition.